La « Brève » du Pôle social : La modulation de la contribution d’assurance-chômage : un nouveau bonus/malus entre en vigueur le 1er janvier 2020

Articles juridiques

Brève du 02/03/2020

Antoine GONTIER, avocat associé, et Arnaud PAGE, stagiaire élève-avocat, attirent votre attention sur la mise en place d’un nouveau système de calcul de la contribution patronale pour l’assurance chômage.

Une nouvelle modulation du taux de contribution qui s’inscrit dans la droite ligne du mécanisme précédent

Ce dispositif a pour but de limiter le recours excessif aux contrats courts. Il correspond à la mise à jour d’un dispositif plus ancien de limitation du nombre de contrats courts.

Dès 2013, la loi avait codifié[1] la possibilité pour les partenaires sociaux de négocier par accord un système de bonus-malus. La Convention UNEDIC de 2014[2] a mis en œuvre une majoration de la contribution d’assurance chômage de 0,5% pour les CDD conclus pour accroissement temporaire d’activité (< 3 mois). En contrepartie, les employeurs de jeunes de moins de 26 ans bénéficiaient d’une exonération temporaire de leur contribution d’assurance chômage. Ce dispositif a pris fin le 31 décembre 2019.

Une modulation du taux de contribution avec des conditions d’application spécifiques

Le règlement UNEDIC met en place un nouveau dispositif pour 2020 consistant en une majoration ou une minoration du taux de contribution d’assurance chômage pour les entreprises de plus de 10 salariés appartenant à 7 secteurs d’activité spécifiques :

  • Fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac (Code NAF : CA) ;
  • Transport et entreposage (Code NAF : HZ) ;
  • Hébergement et restauration (Code NAF : IZ) ;
  • Travail du bois, industries du papier et imprimerie (Code NAF : CC) ;
  • Fabrication de produits en caoutchouc et en plastique ainsi que d’autres produits minéraux non métalliques (Code NAF : CG) ;
  • Production et distribution d’eau ; assainissement, gestion des déchets et dépollution (Code NAF : EZ) ;
  • Autres activités spécialisées, scientifiques et techniques (Code NAF : MC).

Cette modulation du taux de contribution s’inspire du « Bonus-malus » applicable lors de l’achat de véhicules plus ou moins polluant. Ce mécanisme a pour but de récompenser les employeurs qui ont le moins recours aux contrats courts. Pour les autres, la modulation du taux de contribution sera vécue comme une sanction car ceux-là verront leur taux majoré.

Actuellement le taux de contribution de base est de 4,05%. Le décret du 26 juillet 2019[3] instaure une modulation encadrée du taux. Ainsi le taux ne pourra pas dépasser un plafond (5,05%), ni descendre en dessous d’un plancher (3%).

Les modalités de calcul du taux de contribution

Le calcul du taux de contribution tiendra compte du taux de séparation de l’entreprise. Ce taux de séparation sera calculé au regard du nombre de fins de contrat de travail ou de missions d’intérim donnant lieu à inscription à Pôle Emploi. Il est important de noter que le décret prévoit que « toutes les fins de contrats de travail sont prises en compte »[4].

En premier lieu, il est pour le moins surprenant que le texte ne distingue pas entre les CDD et les CDI. En effet, toutes les cessations de contrats ouvrant droit à inscription à Pôle Emploi sont prises en compte alors même que l’objectif affiché est de sanctionner le recours excessif aux contrats courts.

En second lieu, il sera relevé que le décret exclut expressément les démissions, sans distinguer entre les démissions qui donnent lieu à prise en charge par Pôle Emploi et celles qui n’y donnent pas lieu.

Les départs en retraite ne sont pas pris en compte dans le calcul du taux de séparation, ce qui parait logique car les salariés retraités ne vont pas s’inscrire à Pôle Emploi. De plus, certains types de contrats[5] sont exemptés et se voient appliquer le taux de base de 4,05%.

Le décret précise la formule de calcul du taux de contribution applicable à l’entreprise :

Le Ministère du travail a mis en ligne un simulateur pour les entreprises afin de leur permettre d’anticiper leur taux de contribution modulé. En l’état actuel, nous émettons de vives réserves sur la fiabilité de ce simulateur au regard des résultats insolites que celui-ci a produits lors de nos différents tests.

La première modulation du taux de contribution interviendra en 2021 mais en tenant compte de la période d’emploi de 2020

Le décret de 26 juillet 2019 précise que la première modulation du taux de contribution des entreprises concernées interviendra au titre des périodes d’emploi de mars 2021 à février 2022.

La notification du taux modulé sera à la charge de l’URSSAF au début de l’année 2021. En revanche, ce sont les résultats de l’année N-1 qui serviront à calculer le taux applicable à chaque entreprise soit l’année 2020.

Ainsi, il faudra attendre la notification du taux majoré ou minoré pour connaitre le taux applicable aux périodes d’emploi du 1er mars 2021 au 28 ou 29 février de l’année civile suivante.

Le cas des CDD d’usage

Un deuxième dispositif s’applique également depuis le 1er janvier 2020 à l’égard des CDD dits « d’usage ». En effet, la loi de finances pour 2020[6] a mis en place une taxe forfaitaire de 10 € sur les CDD dits « d’usage ». Contrairement au bonus-malus, cette taxe a vocation à s’appliquer dans tous les secteurs d’activité. Cette taxe ne s’applique toutefois pas :

1° Aux contrats conclus avec les salariés intermittents du spectacle (salariés relevant des professions de la production cinématographique, de l’audiovisuel ou du spectacle) ;

2° Aux contrats conclus par les associations intermédiaires du secteur des activités d’insertion par l’activité économique ;

3° Aux contrats conclus avec les ouvriers dockers ;

4° Aux contrats conclus dans les entreprises relevant de secteurs d’activité couverts par une convention ou un accord collectif de travail étendu prévoyant une durée minimale applicable à ces contrats et définissant les conditions dans lesquelles il est proposé au salarié de conclure un contrat de travail à durée indéterminée au terme d’une durée cumulée de travail effectif.

Pôle Social Parthema.


[1] Article L. 5422-12 du Code du travail

[2] Convention du 14 mai 2014 relative à l’indemnisation du chômage

[3] Décret n°2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage

[4] Article 50-6 du décret

[5] Contrat de mission conclu entre une entreprise de travail temporaire et une entreprise utilisatrice, Contrat d’apprentissage, Contrat de professionnalisation, CUI (CUI-CIE et CUI-CAE) et certains contrats de mise à disposition

[6] Article 145 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020