Liquidation de sociétés et assiette du droit de partage

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En cas de liquidation d’une société, le remboursement du capital échappe au droit de partage.

La liquidation d’une société est l’ensemble des opérations par lesquelles les éléments d’actif (fonds de commerce, immeuble, …) sont réalisés, les passifs réglés et la somme subsistante, lorsqu’il en existe une, répartie entre les associés ou actionnaires de cette société.

Cette répartition emporte des conséquences fiscales notamment en matière de droit d’enregistrement.

Lorsque des immeubles, des droits immobiliers, par exemple d’usufruit, des fonds de commerce, un droit au bail sont attribués à un associé autre que l’apporteur, les droits d’enregistrement dus sont les droits de vente par application de la théorie dite de « la mutation conditionnelle des apports ».

Dans les autres hypothèses, l’attribution aux associés des actifs subsistants de la société est soumise au droit de partage dont le taux est de 2,5% et qui se liquide sur la valeur attribuée aux associés.

La question qui se posait était celle de savoir si le droit de partage devait être assis sur le montant total des biens attribués aux associés, ou seulement sur l’écart entre ce montant et le capital social.

La position du droit fiscal

Le droit de partage est régi, hors les régimes spéciaux et exonérations qui ne sont pas en cause ici, par les articles 746 et 747 du Code Général des Impôts. Il résulte du premier que « les partages de biens meubles et immeubles entre … coassociés, à quelque titre que ce soit, pourvu qu’il en soit justifié, sont assujettis au droit ».

Quant au second, il prévoit que ce droit est liquidé « sur le montant de l’actif net partagé ».

Lorsque le partage intervient entre copropriétaires, dans le cadre d’un divorce par exemple, il est constant que l’actif net correspond à l’écart existant entre les actifs détenus indivisément (immeuble, meubles, comptes bancaires, comptes titres …) et le passif correspondant (solde des emprunts bancaires restant à rembourser, taxe foncière et taxe d’habitation, impôt sur le revenu, …).

La position de l’Administration était que cette solution devait être purement et simplement transposée au cas de la liquidation d’une société et qu’ainsi, le droit de partage devait être liquidé sur l’actif brut cumulé des biens français et étrangers de la société, déduction faite du passif grevant cette masse indivise.

Autrement dit, pour l’Administration, le montant du capital social doit être soumis, comme le boni de liquidation, au droit de partage.

 

Le Code civil et le Juge

En matière de liquidation de société, le Code civil prévoit en son article 1844-9 :

« Après paiement des dettes et remboursement du capital social, le partage de l’actif est effectué entre les associés, dans les mêmes proportions que leur participation aux bénéfices … ».

Le Code civil distingue ainsi, dans une liquidation, l’opération de remboursement du capital de celle de la répartition du boni de liquidation.

Le Code Général des Impôts ne donnant aucune définition de l’assiette du droit de partage dans le cas d’une liquidation de société, le Juge de l’impôt (ici la Cour d’Appel de PARIS, 21/06/2016n°12/10858), se réfère aux dispositions du Code civil et décide que le remboursement du capital n’entre pas dans les prévisions des articles 746 et 747 du C.G.I. précités.

Conclusion

Cet arrêt, qui exclut le montant du capital social du droit de partage et contredit la doctrine administrative, peut être invoqué à l’appui de contestations portant sur des liquidations de sociétés intervenues du 1er janvier 2014 jusqu’à aujourd’hui.

Reste à savoir si ce capital doit être limité aux apports que la société avait reçus de ses associés ou s’il doit être étendu aux postes de capitaux propres qui ont pu être incorporés au capital social, tels les postes de réserves.

Jean-Paul LOUVEAU, avocat associé spécialiste du Droit fiscal

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